Francesca Caruana
La galerie est ouverte à nouveau mais nous poursuivons encore l’envoi des visites d’ateliers, en effet nous ne vous les avons pas encore toutes envoyées et certains d’entre vous se trouvent dans des régions toujours confinées. Les artistes ont aimé cet exercice et vous êtes nombreux à avoir apprécié ce partage.
C'est loin de son atelier que le confinement a surpris Francesca Caruana, partie au chevet de sa fille souffrante. Grâce à son portable, elle partage avec nous ses réflexions, photos et travaux réalisées avec des moyens rudimentaires.
Carnet de confinement de Francesca Caruana
Mars/Avril 2020
Œuvres présentées à la galerie
Bois migrants
Dans cette exposition, Francesca Caruana s’est attachée à une métaphore de la migration. Les bois coupés dérivant sur les fleuves, ces arbres qui ne sont rien d’autres que des os du paysage, leurs fibres colorées qui se transforment en objets concourent au rappel des premières images de sa propre arrivée en France. Témoin de ces camions débarqués du Gabon avec leurs chargements de troncs à chair rouge, l’artiste montre une déclinaison de l’arbre et du bois pour livrer son approche poétique ou critique. La plasticité du détournement des formes et matières se fonde sur la gestualité et se réfère au déplacement, au détail.
Lorsque le bois est coupé dans les forêts d’exploitation, des années d’oxygène s’évaporent, mais il le faut.
Lorsqu’un homme est arraché de sa terre, des liens multiples se déchirent, mais il le faut.
Et puis il y a la route, fluviale pour le bois que l’on fait dériver le long du fleuve, poussiéreuse, ou boueuse pour l’homme qu’ on traque. Au bout il y a l’estuaire, le conditionnement, la superposition de troncs, le ficelage, le calibrage, le tri des essences. Au bout il y a les embûches, les palissades, les contrôles, la rétention, l’identité. Ces images mises en parallèle sont le support d’une évocation de matières, de formes mais aussi d’une interprétation de la taille, de la traque, de la rupture, du ligotage, de l’écueil, du naufrage…vues à la loupe de la métaphore. Chaque peinture est présentée avec une pièce de bois ou une planche à la manière d’un échantillonnage, ou d’un prénom, une sorte d’objet direct de l’objet lui-même. Si bien que le visiteur reste libre d’appeler la peinture par son nom comme on le fait avec un humain, ou le compléter avec son prénom. Sans être imprégnée par la nature, je la vis comme l’os indispensable à la continuité, sans la glorifier, sans la préserver à tout prix, juste vivre à son rythme. Qu’elle soit troncs, vagues, algues ou bourrasques.
L’exposition est accompagnée d’un texte au titre éponyme (éd. Voix).